Renforcer la prévention en santé au travail
Posté le 1 juin 2022
Évaluer les risques professionnels en entreprise
Évaluation dans le DUERP
Tous les employeurs doivent élaborer et mettre à jour un document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) dans l’entreprise pour la santé et la sécurité des salariés. Cette évaluation doit comporter un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail de l’entreprise ou de l’établissement. Elle doit également inclure toutes les activités au sein de l’entreprise ou de l’établissement, y compris l’entretien et la maintenance (C. trav. art. R 4121-1 et R 4412-7). Depuis le 31-3-2022, cette évaluation doit également intégrer les risques dans l’organisation du travail (C. trav. art. L 4121-3 et R 4121-1).
Collaboration renforcée du CSE à l’évaluation des risques. Dans le cadre du dialogue social dans l’entreprise d’au moins 50 salariés, le comité social et économique (CSE) et sa commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT), s’ils existent, doivent désormais apporter leur contribution à l’évaluation des risques professionnels dans l’entreprise. Le CSE doit être consulté sur le DUERP et sur ses mises à jour (C. trav. art. L 4121-3 modifié en application de C. trav. art. L 2312-9).
Autres contributeurs à l’évaluation. Doivent également apporter leur contribution à l’évaluation des risques le ou les salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise (salarié compétent, désigné par l’employeur, référent en santé et sécurité), s’il en a été désigné, et le service de prévention et de santé au travail (SPST) auquel l’employeur adhère.
Contenu du DUERP
Répertorier les risques. Depuis le 31-3-2022, l’employeur doit répertorier dans le DUERP l’ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les salariés et assurer la traçabilité de ces expositions, en inscrivant et en mettant à jour dans le DUERP les résultats de l’évaluation de ces risques (C. trav. art. L 4121-3-1, I et II).
Définir les actions de prévention et de protection. À cet effet, l’employeur doit établir sur la base des résultats de l’évaluation des risques professionnels contenue dans le DUERP :
– pour les entreprises d’au moins 50 salariés, un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail qui :
- fixe la liste détaillée des mesures devant être prises au cours de l’année à venir, notamment les mesures de prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels ainsi que, pour chaque mesure, ses conditions d’exécution, des indicateurs de résultat et l’estimation de son coût ;
- identifie les ressources de l’entreprise pouvant être mobilisées ;
- comprend un calendrier de mise en oeuvre.
Dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, l’employeur doit présenter au CSE le programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail.
– pour les entreprises de moins de 50 salariés, la définition et la liste des actions de prévention des risques et de protection des salariés. La liste de ces actions doit être consignée dans le DUERP et ses mises à jour. Dans les entreprises d’au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés, cette liste doit être présentée au CSE (C. trav. art. L 4121-3-1, III, L 2312-5, al. 2 et L 2321-27, 2°).
Mise à jour du DUERP
Depuis le 31-3-2022, la mise à jour du DUERP doit être réalisée :
– au moins chaque année dans les entreprises d’au moins 11 salariés ;
– lors de toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ;
– lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque sera portée à la connaissance de l’employeur.
La mise à jour du programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail ou de la liste des actions de prévention et de protection doit être effectuée à chaque mise à jour du DUERP, si cela est nécessaire (C. trav. art. R 4121-2).
Bon à savoir. Dans les établissements d’au moins 50 salariés dotés d’un CSE, le DUERP doit être utilisé pour établir le bilan annuel de la situation générale de la santé, de la sécurité et des conditions de travail dans l’entreprise et des actions menées au cours de l’année écoulée dans ces domaines, dans le cadre de la consultation du CSE (C. trav. art. R 4121-3 et L 2312-27).
Conservation, mise à disposition et transmission du DUERP
Durée de conservation. Pour assurer la traçabilité des expositions des salariés aux risques professionnels, l’employeur doit conserver le DUERP et ses versions successives pendant au moins 40 ans (C. trav. art. L 4121-3-1, V-A).
Mise à disposition. Pour les versions du DUERP en vigueur au 31-3-2022 et postérieures à cette date, l’employeur doit tenir le DUERP et ses versions antérieures, pendant 40 ans à compter de leur élaboration, à la disposition notamment des salariés et des anciens salariés pour les versions en vigueur durant leur période d’activité dans l’entreprise, des membres de la délégation du personnel du CSE, du SPST, des agents du système d’inspection du travail, des agents des services de prévention des organismes de sécurité sociale et des agents des organismes professionnels de santé, de sécurité et des conditions de travail dans les branches d’activités présentant des risques particuliers (C. trav. art. R 4121-4).
Affichage obligatoire. Un avis indiquant les modalités d’accès des salariés au DUERP doit être affiché à une place convenable et aisément accessible dans les lieux de travail. Dans les entreprises ou établissements dotés d’un règlement intérieur, cet avis doit être affiché au même emplacement que celui réservé au règlement intérieur (C. trav. art. R 4121-4, dernier al). Enfin, l’employeur doit transmettre le DUERP à chaque mise à jour au SPST auquel il adhère (C. trav. art. L 4121-3-1, VI).
Dépôt dématérialisé du DUERP
Pour garantir leur conservation et leur mise à disposition durant au moins 40 ans, le DUERP et ses mises à jour devront faire l’objet d’un dépôt dématérialisé sur un portail numérique déployé et administré par un organisme géré par les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel.
Ce portail numérique garantira la conservation et la mise à disposition du DUERP conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur, préservera la confidentialité des données contenues dans le DUERP et en restreindra l’accès par l’intermédiaire d’une procédure d’authentification sécurisée réservée aux personnes et instances habilitées à déposer et à mettre à jour le DUERP sur le portail ainsi qu’aux personnes et instances justifiant d’un intérêt à y avoir accès.
L’obligation d’un dépôt dématérialisé du DUERP sera applicable :
– à compter du 1-7-2023 pour les entreprises d’au moins 150 salariés ;
– à compter de dates fixées par décret, en fonction des effectifs des entreprises, et au plus tard le 1-7-2024 pour les entreprises de moins de 150 salariés (C. trav. art. L 4121-3-1, V-B).
Bon à savoir. Jusqu’à l’entrée en vigueur de l’obligation de dépôt du DUERP sur un portail numérique, l’employeur doit conserver ses versions successives au sein de l’entreprise sous la forme d’un document papier ou dématérialisée.
Modalités d’application de ce dépôt numérique Les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et inter-professionnel devaient transmettre au ministre chargé du travail, au plus tard le 31-5-2022, leur proposition conjointe de cahier des charges du déploiement et du fonctionnement du portail numérique de conservation du DUERP et les statuts de l’organisme gestionnaire de ce portail, en vue de leur agrément par arrêté. Cette proposition conjointe de cahier des charges est transmise à l’avis conforme de la Cnil. À défaut de conformité, les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel disposent d’un délai d’un mois pour arrêter un cahier des charges conforme à l’avis de la Cnil et le transmettre au ministère chargé du travail. À défaut d’agrément du cahier des charges et des statuts du portail numérique au plus tard le 30-9-2022, ses modalités de mise en oeuvre seront fixées par décret (Décret 2022-487 du 5-4-2022, JO du 6). |
Renforcer le suivi médical des salariés
Rendez-vous de liaison en cas d’arrêt de travail de longue durée
Nouveauté. Depuis le 31-3-2022, lorsqu’un salarié est en arrêt de travail d’au moins 30 jours pour maladie ou accident (professionnel ou non professionnel), constaté par un certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, il peut bénéficier d’un rendez-vous de liaison avec son employeur, en y associant le service de prévention et de santé au travail (SPST) (C. trav. art. L 1226-1-3 et D 1226-8-1).
Objectif de ce rendez-vous. Au cours de ce rendez-vous de liaison, qui a pour but de limiter les difficultés professionnelles lors de la reprise du travail par le salarié en arrêt de travail et d’éviter sa désinsertion professionnelle, l’employeur doit informer le salarié qu’il peut bénéficier :
– d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle, notamment des actions de formation professionnelle continue (actions de formation, bilan de compétences, VAE, ou actions d’évaluation, d’accompagnement, d’information et de conseil auxquelles participe la CPAM) ;
– de l’examen de préreprise (voir ci-après) ;
– et des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail justifiées notamment par l’âge ou l’état de santé physique et mental du salarié (C. trav. art. L 4624-3).
Ce rendez-vous peut être organisé à l’initiative de l’employeur ou du salarié. L’employeur doit informer le salarié qu’il peut solliciter l’organisation de ce rendez-vous. Aucune conséquence ne peut être tirée du refus par le salarié de se rendre à ce rendez-vous (C. trav. art. L 1226-1-3).
Bon à savoir. Dans les entreprises de 250 salariés et plus, et à la demande du salarié, le référent handicap peut participer au rendez-vous de liaison ; il est tenu à une obligation de discrétion à l’égard des informations personnelles qu’il est amené à connaître (C. trav. art. L 5213-6-1).
Visites médicales de reprise et de préreprise
Visite de préreprise. Pour les arrêts de travail débutant après le 31-3-2022, lorsqu’un salarié est en arrêt de travail pour maladie ou accident pour une durée de plus de 30 jours (au lieu de plus de 3 mois auparavant), il peut bénéficier d’une visite médicale de préreprise (C. trav. art. R 4624-29). La visite de préreprise peut être organisée à la demande du salarié, de son médecin traitant ou des services médicaux de l’assurance maladie. L’employeur doit informer le salarié qu’il peut solliciter l’organisation de l’examen de préreprise (C. trav. art. L 4624-2-4).
Nouveauté. Le médecin du travail peut décider d’organiser un examen médical de préreprise lorsque le retour du salarié à son poste est anticipé.
Au cours de l’examen de préreprise, le médecin du travail peut recommander des aménagements et adaptations du poste de travail, des préconisations de reclassement et des formations professionnelles à organiser en vue de faciliter le reclassement du salarié ou sa réorientation professionnelle. Il peut s’appuyer sur le service social du travail du SPST interentreprises (SPSTI) ou sur le SPST de l’entreprise. Le médecin du travail informe, sauf si le salarié s’y oppose, l’employeur et le médecin-conseil de la CPAM de ses recommandations afin que toutes les mesures soient mises en oeuvre en vue de favoriser le maintien dans l’emploi du salarié (C. trav. art. L 4624-3 et R 4624-30).
Visite de reprise. Pour les arrêts de travail débutant après le 31-3-2022, le salarié bénéficie d’un examen de reprise du travail par le médecin du travail :
– après un congé de maternité ;
– après une absence pour cause de maladie professionnelle ;
– après une absence d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail ;
– après une absence d’au moins 60 jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnel (au lieu de 30 jours auparavant).
Organisation de la visite de reprise. Dès que l’employeur a connaissance de la date de la fin de l’arrêt de travail, il doit saisir le SPST qui organise l’examen médical de reprise le jour de la reprise effective du travail par le salarié, et au plus tard dans un délai de 8 jours qui suivent cette reprise (C. trav. art. L 4624-2-3 et R 4624-31).
Visite médicale de mi-carrière du salarié
Nouveauté. Depuis le 31-3-2022, le médecin du travail (ou un infirmier de santé au travail exerçant en pratique avancée) doit examiner le salarié, au cours d’une visite médicale de mi-carrière, qui doit avoir lieu durant l’année civile de ses 45 ans au plus tard, ou à une autre échéance fixée par un accord de branche (C. trav. art. L 4624-2-2).
Cette visite médicale de mi-carrière peut aussi être anticipée et organisée conjointement avec une autre visite médicale (passage de deux visites en même temps) que le médecin du travail doit faire passer au salarié dans les 2 ans avant ses 45 ans. Le salarié peut donc bénéficier de sa visite de mi-carrière lors d’une autre visite médicale organisée durant l’année civile de ses 43 ans ou de ses 44 ans.
Objectif de la visite médicale de mi-carrière : établir un état des lieux de l’adéquation entre le poste de travail et l’état de santé du salarié, à date, en tenant compte des expositions à des facteurs de risques professionnels auxquelles il a été soumis ; évaluer les risques de désinsertion professionnelle, en prenant en compte l’évolution des capacités du salarié en fonction de son parcours professionnel, de son âge et de son état de santé ; sensibiliser le salarié aux enjeux du vieillissement au travail et sur la prévention des risques professionnels.
Attestation de visite. À la fin de la visite, une attestation de visite doit être établie par le médecin du travail.
Propositions du médecin du travail. À l’issue de cet examen, le médecin du travail peut proposer, par écrit et après échanges avec le salarié et l’employeur, des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail justifiées notamment par l’âge ou l’état de santé physique et mental du salarié (C. trav. art. L 4624-3).
Bon à savoir. Dans les entreprises de 250 salariés et plus, et à la demande du salarié, le référent handicap peut participer aux échanges avec le salarié et l’employeur sur la proposition de mesures individuelles d’aménagement de poste ou d’horaires de travail, tout en respectant son obligation de discrétion concernant les informations personnelles qu’il est amené à connaître (C. trav. art. L 5213-6-1). Mais selon le ministère du travail, il ne peut pas assister à l’entretien médical et à l’examen médical du salarié.
Visite médicale post-exposition à des facteurs de risques professionnels
Nouveauté. Depuis le 31-3-2022, le médecin du travail doit examiner les salariés bénéficiant d’un suivi individuel renforcé ou ayant bénéficié de ce suivi au cours de leur carrière professionnelle lors d’une visite médicale qui doit intervenir dans les meilleurs délais après la cessation de leur exposition à des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité, si l’exposition cesse avant la fin de carrière, ou, si ce n’est pas le cas, avant leur départ à la retraite.
Cette visite médicale post-exposition a remplacé la visite médicale de fin de carrière organisée avant le départ à la retraite pour les salariés partant à la retraite depuis le 1-10-2021. La visite médicale post-exposition a désormais lieu dès la cessation de l’exposition au risque du salarié, et non plus seulement avant le départ à la retraite de celui-ci (C. trav. art. L 4624-2-1 et C. trav. art. R 4624-28-1 à R 4624-28-3).
Mise en place d’une surveillance post-exposition ou post-professionnelle. Cet examen médical vise à établir une traçabilité et un état des lieux, à date, des expositions à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels (dus aux contraintes physiques, à un environnement physique agressif, à certains rythmes de travail, C. trav. art. L 4161-1), auxquelles a été soumis le salarié. Le médecin du travail, qui constate une exposition du salarié à certains risques dangereux (notamment à des agents chimiques dangereux, dont poussières et fumées), doit mettre en place une surveillance post-exposition ou post-professionnelle, en lien avec le médecin traitant du salarié et le médecin conseil des organismes de sécurité sociale.
Salariés concernés. La visite médicale post-exposition doit être organisée pour les salariés suivants, dont la cessation d’exposition a été constatée depuis le 31-3-2022 :
– les salariés bénéficiant ou ayant bénéficié d’un suivi individuel renforcé de leur état de santé ;
– les salariés ayant été exposés à un ou plusieurs des risques liés à l’amiante, au plomb, aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction, aux agents biologiques des groupes 3 et 4, aux rayonnements ionisants, au risque hyperbare ou au risque de chute de hauteur lors des opérations de montage et de démontage d’échafaudages, avant la mise en oeuvre du dispositif de suivi individuel renforcé.
Loi 2021-1018 du 2-8-2021 art. 3, 20, 22, 27 et 40, JO du 3 ; décret 2022-395 du 18-3-2022, JO du 20 ; décret 2022-372 art. 5 et 6 et décret 2022-373 art. 2, 2° et 3 du 16-3-2022, JO du 17 ; décret 2022-679 du 26-4-2022 art. 2, JO du 27 ; https://travail-emploi.gouv.fr, Q/R sur les mesures relatives à la prévention de la désinsertion professionnelle issues de la loi du 2 août 2021, 28-4-2022.
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