De nouvelles obligations pour les commerçants et le e-commerce

Posté le 1 mai 2022

Les annonces de réduction de prix davantage encadrées

Actuellement, le prix antérieur (également dénommé « prix de référence » ou « prix barré ») n’est pas défini et peut être librement déterminé par le professionnel, ce dernier devant simplement être en mesure de justifier de la réalité de ce prix et veiller à ce que son annonce ne constitue pas une pratique commerciale déloyale (Arrêté du 11-3-2015).

Principe

Afin d’éviter des promotions calculées à partir de prix de référence gonflé, toute annonce de réduction de prix devra désormais indiquer le prix antérieur pratiqué par le professionnel avant l’application de la réduction de prix (C. consom. art. L 112-1-1).

Le prix antérieur s’entend comme le prix le plus bas pratiqué par le professionnel à l’égard de tous les consommateurs au cours des 30 derniers jours précédant la promotion.

Toutefois, si des réductions de prix se sont appliquées successivement pendant une période déterminée (plusieurs démarques pendant les soldes, par exemple), le prix antérieur sera celui pratiqué avant l’application de la première réduction de prix.

Exceptions

Ces dispositions ne s’appliqueront toutefois pas :

– aux annonces de réduction de prix portant sur des produits périssables menacés d’une altération rapide (boissons et aliments frais ayant des dates de péremption courtes, par exemple) ;
– aux comparaisons de prix effectuées entre professionnels (comparaison de prix nets ayant pour objet d’informer les consommateurs sur les prix pratiqués par différents concurrents).

Sanctions

Le non-respect de cette obligation sera considéré comme une pratique commerciale trompeuse (C. consom. art. L 121-2) et donc passible d’un emprisonnement de 2 ans et de 300 000 € d’amende, ce montant pouvant être porté, de manière pro­portionnée aux avantages tirés du délit, à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel ou à 50 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant ce délit (C. consom. art. L 132-2).

La règlementation des contrats conclus à distance et hors établissement renforcée

Pour rappel, le contrat à distance s’entend de tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d’un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu’à la conclusion du contrat (ex. : contrat de vente sur internet).

Un contrat hors établissement est un contrat conclu dans un lieu qui n’est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, impliquant la présence physique simultanée des parties (ex. : dans une foire ou un salon), ou un moyen de communication à distance immédiatement après que le consommateur a été personnellement et individuellement identifié (démarchage téléphonique, etc.) ou lors d’une excursion organisée par le professionnel (C. consom. art. L 221-1).

Démarchage à domicile

Il sera désormais interdit à un professionnel de démarcher un consommateur à son domicile en vue de lui vendre un produit ou de lui fournir un service lorsque ce dernier a manifesté de manière claire et non ambiguë ne pas vouloir faire l’objet d’une telle visite (C. consom. art. L 221-10-1), sous peine d’une amende pénale de 150 000 € (750 000 € pour une personne morale) et de 1 an de prison (C. consom. art. L 242-7-1).

Une règlementation désormais applicable aux contrats de fourniture ou de service numérique

Les dispositions du Code de la consommation sur les contrats à distance et hors établissement s’appliqueront désormais également aux contrats de fourniture d’un contenu numérique sans support matériel ou d’un service numérique conclus en contrepartie, non pas d’un prix, mais de la fourniture par le consom­mateur de ses données à caractère personnel (sauf lorsque ces données sont exclusivement traitées par le professionnel pour fournir le contenu ou le service numérique).

En outre, l’article L 221-26-1 du Code prévoit expressément que le professionnel devra s’abstenir d’utiliser tout contenu, autre que les données person­nelles, fourni ou créé par le consommateur lors de l’utilisation du contenu ou service numérique (sauf exceptions). Le professionnel devra mettre ce contenu à la disposition du consommateur si celui-ci en fait la demande (il devra pouvoir le récupérer sans frais, dans un délai raisonnable et dans un format couram­ment utilisé).

Lorsque le consommateur exercera son droit de rétractation, il devra s’abstenir d’utiliser le contenu numérique et de le rendre accessible à des tiers. Le professionnel pourra bloquer l’accès au contenu ou au service ou désactiver son compte utilisateur. Le consommateur devra toutefois pouvoir récupérer le contenu qu’il a lui-même créé.

Enfin, pour les contrats dont le contenu numérique est fourni en contrepartie d’un prix, le professionnel devra recueillir par tout moyen le consentement exprès du consommateur lorsque ce dernier souhaite exécuter le contrat avant la fin du délai de rétractation. Il devra également lui demander de reconnaître expressément la perte de son droit de rétractation après l’exécution du contrat.

Informations précontractuelles

Des informations supplémentaires à fournir

De nouvelles informations précontractuelles devront être communiquées par le professionnel au consom­mateur préalablement à la conclusion d’un contrat à distance ou en dehors d’un établissement commercial, y compris donc désormais en cas de contenu ou de service numérique (C. consom. art. L 221-5 et R 221-2).

Ces informations listées à l’article R 221-2 seront désormais au nombre de 15 au lieu de 6 actuellement.

Le professionnel devra ainsi communiquer au consommateur, en plus de celles déjà existantes, les informations suivantes :

– son nom ou dénomination sociale ;
– les modalités de paiement, de livraison et d’exécution prévues dans le contrat ;
– et s’il y a lieu :

  • les moyens de communication en ligne complé-mentaires à son adresse électronique. Ces moyens doivent garantir au consommateur d’être en mesure de conserver tous les échanges écrits avec le professionnel sur un support durable, y compris la date et l’heure de ces échanges ;
  • les modalités de traitement prévues pour le traitement des réclamations ;
  • l’existence et les modalités de mise en oeuvre de la garantie légale de conformité, de la garantie des vices cachés ou de toute autre garantie légale applicable ;
  • l’existence et les modalités de mise en oeuvre de la garantie commerciale et du service après-vente ;
  • la durée du contrat ou, s’il s’agit d’un contrat à durée indéterminée ou à tacite reconduction, les conditions de résiliation ;
  • la fonctionnalité des biens comportant des élé­ments, des contenus et des services numéri­ques, y compris les mesures de protection technique applicables ;
  • toute compatibilité et interopérabilité pertinentes des biens comportant des éléments, des con­tenus et des services numériques dont le pro­fessionnel a ou devrait raisonnablement avoir connaissance ;
  • les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétents auxquels le consom­mateur peut recourir.

À noter que si le professionnel applique un prix personnalisé sur la base d’une prise de décision automatisée (algorithme), il doit désormais en informer le consommateur.

L’interdiction de recevoir un paiement avant l’expiration du délai de 7 jours à compter de la conclusion du contrat hors établissement sera désormais sanctionnée par la nullité du contrat.

Droit de rétractation : nouveaux formulaire et avis d’information type

Lorsque le droit de rétractation existe, le consom­mateur doit être informé des conditions, délais et modalités d’exercice de ce droit. Dans ce cas, le professionnel doit lui fournir un formulaire type de rétractation reproduit en annexe de l’article R 221-1.

Ce formulaire est modifié afin d’y intégrer l’adresse électronique du professionnel, qui sera désormais obligatoire (le recours au fax étant supprimé).

De même, l’avis d’information type (en annexe de l’article R 221-3) concernant l’exercice du droit de rétractation que le professionnel peut fournir au consommateur est modifié.

Nouvelle pratique commerciale trompeuse

Constituera désormais une pratique commerciale trompeuse le fait de présenter un bien comme étant identique à un bien commercialisé dans un ou plusieurs autres États membres alors qu’il a une composition ou des caractéristiques différentes (C. consom. art. L 121-2, 4o).

E-commerce : certaines pratiques commerciales désormais interdites

L’interdiction de certaines pratiques commerciales spécifiques au commerce en ligne s’appliqueront également dès le 28-5-2022 afin de garantir une plus grande transparence aux consommateurs. Ces pratiques sont punies de 2 ans de prison et de 300 000 € d’amende.

Pratiques commerciales trompeuses

Une pratique commerciale est trompeuse (par omission) lorsqu’elle omet une information substantielle dont le consommateur moyen a besoin pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause.

Le caractère substantiel d’une information s’apprécie au cas par cas, sauf pour les communications commerciales constituant une invitation à l’achat où la loi (C. consom. art. L 121-3) liste 5 informations considérées comme substantielles (caractéristiques principales du bien ou du service, adresse et identité du professionnel, prix TTC et frais de livraison, modalités de paiement et de livraison, droit de rétractation).

Trois nouvelles informations considérées comme substantielles viennent s’ajouter à cette liste :

– la qualité de professionnel ou de non-professionnel du vendeur qui propose des produits sur une place de marché en ligne ;
– le paramétrage utilisé pour classer les produits et leur ordre d’importance, lorsque le consommateur peut effectuer une recherche par un mot-clé, une phrase ou la saisie d’autres données. Ces informa­tions devront figurer dans une rubrique spécifique de l’interface en ligne, directement et aisément accessible à partir de la page sur laquelle les résultats de la requête seront présentés. Sont notamment visés par cette mesure les classements des offres de voyages, d’hébergement ou d’activités de loisirs ;
– les informations permettant d’établir si et comment le professionnel garantit que les avis publiés éma­nent de consommateurs ayant effectivement utilisé ou acheté le produit.

Pratiques commerciales réputées trompeuses

La liste des pratiques commerciales réputées trompeuses est complétée par 4 pratiques spécifiques au commerce en ligne. Seront ainsi considérées comme réputées trompeuses en toutes circonstances les pratiques suivantes :

– fournir des résultats de recherche à un consom­mateur sans l’informer du paiement effectué par un tiers pour que ses produits apparaissent dans les résultats ou pour obtenir un meilleur classement de ces derniers ;
– revendre à des consommateurs des billets pour des manifestations lorsque le professionnel les a acquis en utilisant un moyen automatisé lui permettant de contourner toute limite imposée au nombre de billets qu’une personne peut acheter ou toute interdiction applicable à l’achat de billets ;
– affirmer que des avis sur un produit sont diffusés par des consommateurs qui ont effectivement utilisé ou acheté le produit sans avoir pris les mesures nécessaires pour le vérifier ;
– diffuser ou faire diffuser par une autre personne morale ou physique de faux avis ou de fausses recommandations de consommateurs ou modifier des avis de consommateurs ou des recommanda­tions afin de promouvoir des produits.

Terminologie

L’article liminaire du Code de la consommation est compété de nouvelles définitions.

Place de marché en ligne : un service utili-sant un logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte, qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec d’autres professionnels ou consommateurs.

Opérateur de place de marché en ligne : tout professionnel qui fournit une place de marché en ligne aux consommateurs.

Pratique commerciale : toute action, omis­sion, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un bien, d’un service, ou portant sur des droits et obligations.

De nouvelles sanctions et des sanctions durcies pour certaines infractions

Les pratiques commerciales déloyales de grande ampleur transfrontalières sanctionnables

Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence profession­nelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonna­blement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service (C. consom. art L 121-1).

Une amende civile pourra désormais être prononcée à l’encontre d’un professionnel qui aura eu recours, de manière continue, à une pratique commerciale reconnue déloyale, autre que trompeuse ou agressive, constitutive d’une infraction de grande ampleur ou de grande ampleur à l’échelle de l’Union européenne et qui a fait l’objet d’une décision de justice devenue définitive à son égard.

L’amende de 300 000 € pourra être portée jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires (CA) moyen annuel (calculé sur les 3 derniers CA annuels connus à la date de la décision) en fonction des avantages tirés des pratiques en cause ou jusqu’à 2 M€ en l’absence d’information disponible sur le CA.

L’amende pourra être prononcée :

– par la juridiction civile à la suite d’une demande d’assistance mutuelle formulée par un État membre de l’Union ou par la Commission européenne (règlement 2017/2394) ;
– par une décision ou un avis du Conseil d’État ou de la Cour de cassation.

La DGCCRF, les associations de défense des consommateurs, le ministère public ou le consom­mateur lésé pourra solliciter auprès de la juridiction saisie le prononcé de l’amende.

Le professionnel pourra en outre se voir ordonner de publier, de diffuser ou d’afficher la décision de justice ou un extrait de celle-ci, et notamment de l’insérer dans le rapport de gestion de l’entreprise.

Qu’est-ce qu’une infraction de grande ampleur ?

Une « infraction de grande ampleur » est une infraction qui porte atteinte aux intérêts collectifs des consommateurs résidant dans au moins 2 États membres de l’UE (Règl. 2017/2394 art. 3, a).

Une « infraction de grande ampleur à l’échelle de l’Union européenne » est une infraction qui porte atteinte aux intérêts collectifs des consommateurs dans au moins deux tiers des États membres représentant une population cumulée d’au moins deux tiers de la population de l’Union (art. 3, b).

Des sanctions rehaussées pour certaines infractions

Le montant de certaines amendes, actuellement de 3 000 € pour les personnes physiques et de 15 000 € pour les personnes morales, sera relevé respective­ment à 15 000 € et à 75 000 €. Il en sera ainsi :

– de l’amende prévue en cas de manquement par le professionnel à son obligation précontractuelle d’information sur l’existence et les modalités de mise en oeuvre des garanties légales (conformité et vices cachés), des éventuelles garanties commer­ciales, et, le cas échéant, du service après-vente (SAV) et des autres conditions contractuelles ;
– de l’amende administrative prévue en cas de man­quement par le professionnel à ses obligations contractuelles ou d’informations précontractuelles ou de confirmation du contrat (contrats à distance et hors établissement) ;
– de l’amende administrative qui sanctionne les professionnels dont les contrats conclus avec des consommateurs ou des non-professionnels comportent des clauses « noires », c’est-à-dire des clauses réputées présumées abusives de manière irréfragable et donc interdites.

Ces montants sont également ceux de la nouvelle amende civile sanctionnant le professionnel qui continue de recourir à des clauses déjà reconnues abusives par une décision de justice définitive dans des contrats identiques proposés ou conclus avec des consom-mateurs ou des non-professionnels. Sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Dans les 3 derniers cas (contrat à distance et hors établis-sement, clauses « noires » et abusives), le montant de l’amende pourra être porté à 4 % du CA ou 2 M€ en cas de demande d’assistance mutuelle pour infraction de grande ampleur ou de grande ampleur transfrontalière.

Ord. 2021-1734 du 22-12-2021, JO du 23 ; Décret 2022-424 du 25-3-2022, JO du 26

© Lefebvre Dalloz

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