Création d’un plan de partage de la valorisation de l’entreprise

Posté le 12 décembre 2023

Un  nouveau dispositif collectif de partage de la valeur dans l’entreprise, le plan de partage de la valorisation de l’entreprise (PPVE), pourra être institué, à titre facultatif, dans les entreprises et dans les groupes d’entreprises. Ce dispositif permettra de verser aux salariés une prime de partage de valorisation de l’entreprise lorsque la valeur de l’entreprise augmentera au cours d’une période de 3 ans, tout en bénéficiant d’un régime social et fiscal de faveur (Loi art. 10). Un seul PPVE par entreprise pourra être mise en place sur une même période de 3 ans.

 

Un décret déterminera les modalités d’application du PPVE.

 

Bon à savoir. L’actionnariat salarié permet aux salariés de posséder des actions de leur entreprise, devenant ainsi « actionnaires salariés » et propriétaires d’une partie de la société. Toutefois, ce dispositif n’est pas adapté aux entreprises qui ne sont pas constituées en société par actions et n’ont pas la possibilité d’ouvrir leur capital. Les dirigeants des petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de tailles intermédiaires (ETI) non cotées, qui souhaitent mettre en place l’actionnariat salarié sont souvent freinés par la complexité de l’opération et par l’ouverture du capital qui implique notamment l’ouverture de la gouvernance. Or le dirigeant peut souhaiter offrir à ces salariés une prime qui reflète néanmoins la valorisation de l’entreprise. Ainsi, l’éventail de dispositifs d’épargne salariale existants pour partager la valeur est enrichi par un nouveau dispositif qui permettra d’associer financièrement les salariés à la progression de la valeur de leur entreprise, sans passer par un dispositif d’actionnariat salarié (étude d’impact p. 79).

 

Employeurs concernés. Pourront mettre en place un PPVE les entreprises de droit privé, les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), les établissements publics administratifs (EPA) lorsqu’ils emploient du personnel de droit privé, les groupes d’entreprises, y compris ceux constitués par des sociétés coopératives, des unions de coopératives et de leurs filiales (C. trav. art. L 3311-1, L 3344-1 et L 3344-2 ; Loi art. 10, II).

 

Bénéficiaires. Tous les salariés de l’entreprise ou du groupe ayant au moins 1 an d’ancienneté dans l’entreprise bénéficient du PPVE, sauf si l’accord le mettant en place prévoit une ancienneté inférieure. Cette ancienneté s’apprécie à la date de début de la valorisation fixée par l’accord instituant le PPVE et elle est calculée en prenant en compte tous les contrats de travail exécutés dans l’entreprise ou dans le groupe d’entreprises au cours des 12 mois précédant cette date (Loi art. 10, III).

Les salariés qui atteignent l’ancienneté prévue ou quittent l’entreprise de manière définitive pendant la durée de 3 ans du plan ne bénéficieront pas de la prime de partage de la valorisation de l’entreprise.

 

Mise en place du PPVE 

Le PPVE sera mis en place par un accord, établi sur rapport spécial du commissaire aux comptes de l’entreprise ou, s’il n’en a pas été désigné, d’un commissaire aux comptes désigné à cet effet par l’organe compétent de l’entreprise ou du groupe, selon l’une des modalités suivantes :

– par une convention ou un accord collectif de travail ;

– par un accord entre l’employeur et les représentants d’organisations syndicales représentatives dans l’entreprise ;

– par un accord conclu au sein du comité social et économique (CSE) ;

– à la suite de la ratification, à la majorité des 2/3 du personnel, d’un projet d’accord proposé par l’employeur.

Lorsqu’il existe dans l’entreprise une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ou un CSE, la ratification devra être demandée conjointement par l’employeur et par une ou plusieurs de ces organisations ou le CSE (Loi art. 10, X).

 

 

Modalités du PPVE

 

Une prime pour les salariés. Le PPVE permettra aux salariés de bénéficier d’une prime de partage de la valorisation de l’entreprise dans le cas où la valeur de l’entreprise a augmenté au cours des 3 années suivant la date de début de la période de 3 ans fixée par l’accord instituant le plan.

Calcul de la prime. Un montant de référence est fixé pour chaque salarié en application de l’accord. Pour chaque salarié, la prime de partage de la valorisation de l’entreprise résultera de l’application à ce montant de référence du taux de variation de la valeur de l’entreprise, lorsque ce taux sera positif. Lorsque ce taux sera négatif ou nul, le salarié ne bénéficiera d’aucune prime de partage de la valorisation (Loi art. 10, IV).

 

Montant de référence modulable. Ce montant de référence pourra différer selon les salariés en fonction de la rémunération, du niveau de classification ou de la durée de travail prévue au contrat de travail (Loi art. 10, V).

 

Détermination du taux de variation de la valeur de l’entreprise. Le taux de variation de la valeur de l’entreprise correspondra au taux de variation constaté entre la valeur de l’entreprise déterminée à la date de début du plan fixée par l’accord et la valeur de l’entreprise à l’expiration du délai de 3 ans débutant le lendemain de cette date (Loi art. 10, VI).

 

Pour les entreprises constituées sous la forme de sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, la valeur de l’entreprise correspondra à sa capitalisation boursière moyenne sur les 30 derniers jours de bourse précédant les dates de début et de fin de la période de 3 ans.

Pour les autres entreprises, la formule de valorisation de l’entreprise sera déterminée par l’accord instituant le plan et s’appliquera aux dates de début et de fin de la période de 3 ans.

Cette formule de valorisation de l’entreprise permettra d’évaluer la valeur de l’entreprise en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la situation nette comptable, de la rentabilité et des perspectives d’activité. Ces critères seront appréciés, le cas échéant, sur une base consolidée ou, à défaut, en tenant compte des éléments financiers issus des filiales significatives. Cette formule pourra s’appuyer sur des comparaisons avec d’autres entreprises du même secteur.

 

À noter. Si l’accord ne contient pas de formule de valorisation de l’entreprise ou si cette formule est impossible à appliquer, la valorisation de l’entreprise sera égale au montant de l’actif net réévalué, calculé d’après le bilan le plus récent.

 

Montant et versement de la prime attribuée. Le montant de la prime distribuée à un même salarié ne pourra, au titre d’un même exercice, excéder une somme égale à 75 % du montant annuel du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) (Loi art. 10, VII).

Les sommes dues aux salariés au titre du PPVE seront arrêtées dans un délai de 7 mois à compter de la date de fin du plan (date d’expiration du délai de 3 ans).

Le versement de la prime pourra être réalisé en une ou plusieurs fois au cours des 12 mois suivants (Loi art. 10, VIII).

 

Non-substitution au salaire et aux autres dispositifs d’épargne salariale. La prime attribuée aux salariés en application d’un PPVE ne pourra pas se substituer :

– à des éléments de rémunération pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations sociales, qui sont en vigueur dans l’entreprise au moment de la mise en place du plan ou qui deviennent obligatoires en application de règles légales, contractuelles ou d’usage ;

– à un autre dispositif d’épargne salariale ou de partage de la valeur ;

– à des augmentations de rémunération ou à des primes prévues par un accord salarial, par le contrat de travail ou par les usages en vigueur dans l’entreprise ou le groupe.

 

Cependant, cette règle ne pourra pas avoir pour effet de remettre en cause les exonérations fiscales et sociales applicables aux primes attribuées dès lors qu’un délai de 12 mois se sera écoulé entre le dernier versement de l’élément de rémunération en tout ou partie supprimé et la date de mise en place du plan.

La prime attribuée au titre du PPVE n’a pas le caractère d’élément de salaire pour l’application de la législation du travail (Loi art. 10, IX).

 

Contenu de l’accord. L’accord instituant le PPVE définira notamment :

– le montant de référence auquel sera appliqué le taux de variation de la valeur de l’entreprise ;

– les éventuelles conditions de modulation du montant de référence entre les salariés ;

– la formule de valorisation retenue pour les entreprises dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé ;

– la date d’appréciation de la valeur de l’entreprise qui constituera le point de départ de la durée de 3 ans du plan et la date 3 ans plus tard d’appréciation de la valeur de l’entreprise permettant de calculer le taux de variation de la valeur de l’entreprise ;

– la ou les dates de versement de la prime.

L’accord pourra prévoir la reconduction du PPVE et précisera alors ces mêmes éléments pour la mise en œuvre de cette reconduction (Loi art. 10, XI).

 

Affectation à un plan d’épargne salariale ou à un plan d’épargne retraite d’entreprise (Pere)

Lorsqu’un salarié qui a adhéré à un plan d’épargne salariale (PEE, PEI, Perco) ou à un plan d’épargne retraite d’entreprise (Pereco et Pero) affectera à la réalisation de ce plan, dans un délai défini par décret, tout ou partie de la prime de PPVE qui lui est attribuée par l’entreprise, ces sommes bloquées seront exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite, par an et par bénéficiaire, de 5 % du montant maximal de la prime, soit 3,75 % (5 % de 75 % du PASS).

L’employeur devra informer le salarié des sommes qui lui seront attribuées au titre de la prime de PPVE et du délai dans lequel il pourra formuler sa demande d’affectation au plan d’épargne salariale ou au Pere (Loi art. 10, XII).

 

À noter. En cas de non-affectation de la prime de PPVE dans un plan d’épargne salariale ou dans un Pere, elle sera soumise à l’impôt sur le revenu.

 

Régime social de la prime

Les primes de PPVE versées dans la limite d’un montant de 75 % du PASS au cours des exercices des 2026-2028 seront exonérées :

– de toutes les cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié et de l’employeur ;

–  du forfait social ;

– de la participation patronale à l’effort de construction ;

– des contributions au titre de la formation professionnelle et de l’alternance.

 

Les primes seront soumises, à l’occasion de leur versement, à une contribution patronale au taux de 20 % au profit de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), établie, recouvrée et contrôlée dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités applicables à la contribution sur les attributions d’actions gratuites (AGA) et stock-options (Loi art. 10, XIII).

 

Dépôt de l’accord pour bénéficier des exonérations. Pour ouvrir droit aux exonérations fiscales et sociales, l’accord instituant le PPVE devra être déposé auprès de l’autorité administrative compétente dans des conditions déterminées par décret. En l’absence d’observation par l’Urssaf (ou la MSA ou CGSS) à l’expiration d’un délai fixé par décret, les exonérations seront réputées acquises (Loi art. 10, XIV).

Le PPVE n’aura pas à être publié dans la base de données légales nationales des accords collectifs (Loi art. 10, XV).

 

Source. Loi 2023-1107 du 29-11-2023 transposant l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise art. 10, JO du 30.

© Lefebvre Dalloz

Ce site internet utilise les cookies pour vous assurer la meilleure navigation possible. Vous pouvez gérer ces derniers, ci-dessous, conformément au RGPD
En savoir plus Gestion des cookies Fermer