Un ordre de bourse doit pouvoir être annulé ou modifié tant qu’il n’a pas encore été exécuté
Posté le 2 décembre 2021
Les circonstances de l’affaire
Un épargnant passe par internet, un samedi, deux ordres d’achat « au marché » auprès de sa banque. Il constate, le lundi suivant, une augmentation de 145 % de la valeur des actions sur lesquelles portent les deux ordres, lesquels n’ont pas encore été exécuté :
· il tente alors de les annuler durant la période de réservation de cotation, en vain faute de pouvoir accéder à son espace bourse en ligne et joindre un téléconseiller ou la salle de marché ;
· il arrive cependant à contacter par téléphone une conseillère, mandataire de l’établissement en matière d’assurance, qui n’a cependant pas les accès requis pour saisir l’annulation des ordres.
À noter. Un ordre au marché ne comporte pas de limite de prix et est intégralement exécuté aux différents prix successifs de la première cotation suivant son enregistrement, jusqu’à épuisement de la quantité, le nombre de titres étant en effet prioritaire au prix.
Les ordres sont exécutés malgré l’insuffisance de provision sur le compte-espèces associé au compte-titres de l’épargnant, avec pour conséquence un solde débiteur de plus de 38 000 €.
L’intermédiaire financier demande au client de combler le déficit sous peine de l’application de pénalités de retard. Ce dernier n’a d’autres alternatives que de céder l’essentiel de son portefeuille, dont les actions qui viennent d’être achetées mais dont le cours a fortement baissé. Il sollicite alors l’intervention du médiateur de l’AMF.
L’intermédiation
En premier lieu, le médiateur de l’AMF relève que la vérification de la provision du compte-espèces, prévue par les conditions générales de la banque, a effectivement lieu :
· lorsque l’ordre est saisi par le client par rapport au dernier cours à cette date (augmenté d’une marge de précaution de 2 %, en l’espèce) ;
· et non lorsque l’ordre est exécuté.
Mais les mêmes conditions générales, en ce qu’elles retiennent que l’ordre ne peut pas être annulé dès lors qu’il a été saisi par le client, sont manifestement erronées, ajoute-t-il.
Le médiateur rappelle en effet :
· d’une part, qu’un ordre de bourse est avant tout un mandat donné par un client à son teneur de compte, donc révocable à la demande de ce client quand bon lui semble (C. civ. art 2004) ;
· et, d’autre part, que tout ordre de bourse transmis au marché (autrement dit, produit dans le carnet d’ordres central) peut être modifié ou annulé tant qu’il n’a pas été exécuté (règles de marché Euronext Livre I n°4202/4).
Or, le témoignage écrit de l’agent mandataire confirme la volonté de l’épargnant d’annuler les ordres litigieux durant la période de réservation et les difficultés rencontrées par celui-ci pour tenter de joindre l’établissement.
La banque accepte finalement de procéder au remboursement nécessaire.
À noter. Est ici sans incidence le fait, qu’au moment de la saisie des ordres d’achat sur internet, une alerte était affichée sur les risques importants de fluctuation de cours et de liquidités sur les titres en cause, lesquels ont fait l’objet d’une forte demande ayant entraîné l’augmentation de cours.
AMF, Journal de bord du médiateur, 3-11-2021
© Lefebvre Dalloz